La force du Requiem de Sender (1901-1982) – l’un des livres essentiels parmi tous ceux qui ont pour trame la guerre d’Espagne – réside dans sa capacité à tout dire (et transmettre) en usant simplement de l’ellipse et de la suggestion. Le décor, l’époque (1936), les personnages et l’argument du roman sont rapidement posés.
Un curé s’apprête à célébrer une messe de requiem pour un jeune homme exécuté un an plus tôt par les phalangistes. Assis dans sa sacristie, en compagnie d’un enfant de chœur et d’un sacristain presque invisible, il attend l’arrivée de la famille et des amis de Paco du moulin, le jeune paysan assassiné.
Or, personne ne vient, hormis le poulain du mort (qui cavale dans l’allée centrale et qu’il faut chasser) et trois hommes redoutables (représentant l’ordre, le pouvoir et la noblesse), plus ou moins impliqués dans le meurtre. Tous veulent d’ailleurs payer la messe, espérant solder à leur manière un passé qui ne cesse de hanter le curé dont la responsabilité dans l’exécution est indéniable. C’est en effet lui qui, après avoir reçu des centurions la promesse qu’un jugement équitable serait rendu, a indiqué l’endroit où Paco avait dû se cacher pour ne pas subir le sort réservé à tous ceux qui se plaçaient du côté des républicains. Sitôt débusqué, le fugitif sera fusillé.
Le prêtre, les yeux fermés d’un bout à l’autre du récit (ce qui est loin d’être anodin), se remémore un à un, et chronologiquement, les épisodes qui ont marqué les vingt-cinq ans de la vie de Paco. Il le fait en sachant (sans se l’avouer) que si l’église reste vide, c’est parce que pas un des villageois ne souhaite assister à une messe célébrée par celui qui a trahi.
Ramon Sender, sans accabler le prêtre, montre, par touches successives, sa naïveté et sa soumission à l’ordre établi. Il le fait en s’attachant à ce que le personnage central du roman ne soit pas celui qui dévide sa mémoire mais l’autre, le mort, toujours présent, qui a su passer le témoin à ceux qui affirment leurs convictions en ne se rendant justement pas à l’église ce jour-là.
Un curé s’apprête à célébrer une messe de requiem pour un jeune homme exécuté un an plus tôt par les phalangistes. Assis dans sa sacristie, en compagnie d’un enfant de chœur et d’un sacristain presque invisible, il attend l’arrivée de la famille et des amis de Paco du moulin, le jeune paysan assassiné.
Or, personne ne vient, hormis le poulain du mort (qui cavale dans l’allée centrale et qu’il faut chasser) et trois hommes redoutables (représentant l’ordre, le pouvoir et la noblesse), plus ou moins impliqués dans le meurtre. Tous veulent d’ailleurs payer la messe, espérant solder à leur manière un passé qui ne cesse de hanter le curé dont la responsabilité dans l’exécution est indéniable. C’est en effet lui qui, après avoir reçu des centurions la promesse qu’un jugement équitable serait rendu, a indiqué l’endroit où Paco avait dû se cacher pour ne pas subir le sort réservé à tous ceux qui se plaçaient du côté des républicains. Sitôt débusqué, le fugitif sera fusillé.
Le prêtre, les yeux fermés d’un bout à l’autre du récit (ce qui est loin d’être anodin), se remémore un à un, et chronologiquement, les épisodes qui ont marqué les vingt-cinq ans de la vie de Paco. Il le fait en sachant (sans se l’avouer) que si l’église reste vide, c’est parce que pas un des villageois ne souhaite assister à une messe célébrée par celui qui a trahi.
Ramon Sender, sans accabler le prêtre, montre, par touches successives, sa naïveté et sa soumission à l’ordre établi. Il le fait en s’attachant à ce que le personnage central du roman ne soit pas celui qui dévide sa mémoire mais l’autre, le mort, toujours présent, qui a su passer le témoin à ceux qui affirment leurs convictions en ne se rendant justement pas à l’église ce jour-là.
Un autre texte de Sender, intitulé Le Gué, toujours écrit sur fond de guerre civile, touchant là encore à la dénonciation et à la mort certaine qui s’en suit, est publié à la suite du Requiem. Récit aussi bref et percutant que le précédent.
L’écrivain, né en Aragon, où se déroulent les faits racontés dans ces deux textes, a vu sa femme être assassinée durant la guerre. Son frère Manuel fut également exécuté en 1936. « Ceux que l’on appelle les fascistes le tuèrent pour le simple et noble fait d’avoir été démocratiquement élu maire de Huesca ».
Paco, le héros du Requiem (livre interdit en Espagne jusqu’en 1974 et publié une première fois en France en 1976 chez Fédérop) a connu un destin identique. Et pour les mêmes raisons.
Ramon Sender : Requiem pour un paysan espagnol (traduit par Jean-Paul Cortada) et Le Gué (traduit par Jean-Pierre Ressot), éditions Attila.