1972. Interrogatoire serré dans le bureau de Nino Pepperoni, le patron 
de la mafia new-yorkaise. Il veut savoir qui a pu mettre enceinte sa 
fille Anna Maria qui vient de rentrer d’un long voyage journalistique à 
Moscou. Pour lui, pas de doute, ce ne peut être que le "camarade" Brejnev 
ou, à défaut, Kossyguine puisque c’était pour les interviewer tous les 
deux qu’elle s’était envolée pour l’U.R.S.S. Détails à l’appui, il 
apprend bientôt que le futur père n’est ni l’un ni l’autre mais tout 
simplement  Sergueï Mandelbaum, dissident juif fauché qui a jadis 
travaillé dans l’armement et qui n’a, pour cette raison, plus le droit 
de quitter le pays. Anna Maria ajoute que cet homme a fait d’elle une 
femme en lui procurant son premier orgasme. « Orgasme ? Kezako ? » 
Pepperoni découvre le mot en même temps que sa signification. Il en 
informe sa femme qui, elle non plus, n’en a jamais entendu parler.
« Pour un authentique Sicilien tel que Nino Pepperoni, un homme très à
 cheval sur la morale, il y a deux moyens de régler son compte au 
séducteur de sa fille : le buter ou lui faire épouser Anna Maria. »
C’est la seconde solution qui est adoptée lors du conseil de famille 
qui s’en suit. Pour cela, pour que Mandelbaum traverse sans problèmes le
 rideau de fer , le chef de la mafia, aidé de son fidèle avocat et 
conseiller Archibald Seymour Slivovitz vont se payer les services du 
passeur le plus célèbre de la planète, un nommé Sepp Karl Lopp, citoyen 
autrichien vivant à Mexico. Problème : celui-ci aime les hommes et 
serait, dit-on, adepte du dépeçage sexuel. Ce dernier point inquiète 
tout particulièrement Nino Pepperoni.
« Interpol recherche Lopp, dit Mr. Slivovitz. Mais Interpol est une 
organisation peu compréhensive envers les petites faiblesses humaines. 
Lopp n’est pas un mauvais bougre. Il est juste malade. Et on peut le 
guérir. »
Le  traitement le plus rapide reste la castration pure et 
simple. C’est ce qui est décidé.  L’illustre passeur ne devra jamais 
connaître le nom des commanditaires du  guet-apens dans lequel il va 
tomber. L’opération sera pratiquée dans les règles de l’art par le 
docteur Benito Russolini, un ami de la famille. Une fois « guéri », Lopp
 pourra gagner Moscou l’esprit libre et mener à bien sa mission. C’est 
tout au moins ce qu’espèrent  Pepperoni et Slivovitz.
L’affaire Mandelbaum est lancée. Un chauffeur en Cadillac jaune attend déjà  S.K. Lopp à l’aéroport J.F.K. 
Edgar Hilsenrath surveille tout cela de près. Ses yeux rieurs pétillent. Il mène tout ce beau monde là où il le souhaite. Avec malice et irrévérence. Il faut dire que l’auteur de Fuck America est ici en très grande forme. Il prend plaisir à s’amuser. Il détourne à sa façon le traditionnel roman d’espionnage. La verve, l’hilarité, la tension burlesque qui l’animent lui sont d’un précieux secours.
Edgar Hilsenrath surveille tout cela de près. Ses yeux rieurs pétillent. Il mène tout ce beau monde là où il le souhaite. Avec malice et irrévérence. Il faut dire que l’auteur de Fuck America est ici en très grande forme. Il prend plaisir à s’amuser. Il détourne à sa façon le traditionnel roman d’espionnage. La verve, l’hilarité, la tension burlesque qui l’animent lui sont d’un précieux secours.
Il lui a fallu six jours, pas plus, pour concocter cette histoire 
ponctuée de rebondissements en séries. L’envers du décor (de la guerre 
froide, du rêve américain et de la mafia pimpante) lui sert de moteur. 
Il y ajoute une folie contagieuse. Y glisse des portraits plus vrais que
 nature. Ses personnages font des allers-retours mouvementés de l’Est à 
l’Ouest (et inversement) avec escales en Israël ou à Rome en en 
apprenant toujours un peu plus sur l’état fébrile du monde.
Hilsenrath
 revisite les années 70  à toute allure. Le grand théâtre loufoque qu’il
 met en forme et en scène (à coups de dialogues enflammés) est imparable
 et diablement réjouissant.
Edgar Hilsenrath : Orgasme à Moscou, traduit de l’allemand par Jörg Stickan et par Sacha Zlberfarb, illustré par Hennig Wagenberg, éditions Attila.
Edgar Hilsenrath : Orgasme à Moscou, traduit de l’allemand par Jörg Stickan et par Sacha Zlberfarb, illustré par Hennig Wagenberg, éditions Attila.

 
 

