Nul besoin de connaître Chartres et ses environs pour se repérer dans
les textes (poèmes et proses) de Jean-Paul Bota. Sa façon de se
promener en posant son regard là où il sait trouver de quoi nourrir sa
curiosité permet à qui souhaite le suivre de se familiariser aisément
avec les lieux. Il les as longuement fréquentés, s’en est imprégné, a
découvert leur histoire, les a vus se transformer et les redécouvre à
chaque visite sous un angle différent. Ceux qui (célèbres ou anonymes)
sont passés là avant lui et qui y ont laissé leur empreinte restent ses
meilleurs guides. Raymond Isidore, qui fit de la mosaïque avec des
débris de porcelaine et de la vaisselle cassée, que l’on moquait, que
l’on surnommait « pique assiette », qui fit œuvre chez lui, décorant
avec ses bouts de verre l’intérieur et l’extérieur de sa maison (la
maison Picassiette, désormais classée Monument Historique) est
évidemment l’un d’entre eux.
« À converser Dubuffet l’art brut, le quartier du cimetière de Saint-Chéron, la maison de Picassiette où lui Raymond Isidore dit
et 1930, proche l’actuelle rue du Repos où il débute de construire sa
maison, à dire durant près d’un quart de siècle celle-là même qu’il
recouvre, parois intérieures et extérieures et pareillement les dallages
de la cour, de bris de vaisselle multicolores issus de décharges
publiques ou des salles de ventes, »
Les peintres sont, comme toujours chez J.P. Bota, très présents.
Beaucoup se sont attaqués à la célèbre Cathédrale (« Surgie en mémoire
Cathédrale d’Utrillo. Pierre illuminée des reflets du soleil au déclin
du jour ») pendant que d’autres se frottaient à la plaine, à
l’immensité de la Beauce. Vlaminck, le « colosse d’Eure-et-Loir » fut
l’un d’entre eux. Chaïm Soutine également, qui séjourna régulièrement à
Lèves, chez Madeleine et Marcellin Castaing. Il y réalisa de nombreux
tableaux dont La Cathédrale, Les Escaliers, La Route des Grands-Prés.
« L’hiver, il faisait très froid. On faisait des feux magnifiques
dans la cheminée de ma chambre. Moi je me couchais, Marcellin et Soutine
se mettaient de chaque côté de la cheminée et on restait à parler
peinture jusqu’à deux heures du matin » (Madeleine Castaing).
Jean-Paul Bota fouille dans les interstices. Il va de rues en
ruelles, de portes en cours, de places en venelles en quête d’un
chapiteau Renaissance, d’une rosace particulière, d’une sculpture
étonnante ou d’une maison romane à découvrir. Il chemine le stylo à la
main, se remet volontiers en tête tel ou tel musicien qui l’accompagne,
note ce que son regard happe et le relie à sa connaissance des lieux.
Une autre main, celle de David Hébert, prend le relais pour dessiner,
avec justesse et simplicité, nombre des façades, figures, détails,
ponts, statues, édifices, poutres, gargouilles, échauguettes, vitrines,
toits et moulins qui apparaissent au fil de ce périple en ville et
alentour.
Jean-Paul Bota & David Hébert : Chartres et environs, carnets nomades, éditions des Vanneaux.
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