« Depuis longtemps je bricole. Des pièces bancales. De l’inutile
indispensable. Des mots de peu. Ma poésie n’est pas grand-chose. Elle
est militante du minuscule. »
On retrouve, comme toujours chez lui, de fréquentes références aux
miettes, aux brindilles, à la poussière. Tout ce qui est susceptible
d’être balayé d’un revers de main l’attire. Il y perçoit une analogie
avec ces milliers d’instants fluides qui s’additionnent chaque jour, le
plus souvent en pure perte, et dont il faudrait, tout de même, songer à
capturer un ou deux spécimens de temps à autre, ne serait-ce que pour
approcher (puis allumer) un peu de réalité heureuse en soi.
« D’abord apprendre
à faire ce qu’on peut
avec ce qu’on a
ensuite apprendre
à faire ce qu’on peut
avec ce qui nous manque »
à faire ce qu’on peut
avec ce qu’on a
ensuite apprendre
à faire ce qu’on peut
avec ce qui nous manque »
Il s’agit de détecter, au jour le jour, ces frottements infimes où
se croisent parfois l’ordinaire et l’essentiel. Cela éclaire l’instant.
Le noter, l’écrire et donner au poème toute la simplicité requise pour
espérer toucher l’autre lui est nécessaire. C’est ainsi qu’il conçoit
son écriture, « entre l’instinct et le besoin » dans une sorte d’usage
des jours, qu’il traverse en recherchant l’instant T., celui qui fera
tilt et qu’il fera vivre de façon autonome, en y conviant, à l’occasion,
l’un des animaux familiers de son bestiaire fétiche et portatif.
L’éléphant ivre y trône en bonne place. Il peut même venir manger des
fleurs à l’intérieur de son cœur. Parfois, c’est l’ours qui lui colle
des beignes en pleine nuit. Ou le kangourou qui apparaît, franchissant
des murailles, accroché à un hélicoptère.
Lucide et spontané, il cherche inlassablement à repérer puis à dire
ces parcelles de vie habitées et animées qui aident à ne pas sombrer. Il
le fait en douceur, avec une étonnante non-violence verbale, loin de
toute béatitude.
« On ne se refait pas
c’est bête
vu tout le temps
passé
à se défaire »
Thomas Vinau : Juste après la pluie, Alma éditeur.
c’est bête
vu tout le temps
passé
à se défaire »
Thomas Vinau : Juste après la pluie, Alma éditeur.