lundi 16 mars 2020

Ourson les neiges d'antan ?

Lucien Suel et William Brown se sont rencontrés grâce au réseau international du Mail Art. Ils ont travaillé ensemble pendant une douzaine d’années, créant de nombreux livres d’artistes publiés à tirages limités. Ce sont eux qui sont réunis dans cet ouvrage, donnant une belle visibilité à l’œuvre à quatre mains initiée par le poète et le peintre.

William Brown est décédé en 2008. Il a vécu son enfance au Canada avant de s’installer au Pays de Galles et « Ourson les neiges d’antan ? » était la question malicieuse qu’il posait de temps à autre à Lucien Suel. Ce dernier répond par écrit, dans des formes brèves, souvent en vers justifiés, stimulé par ces contraintes, d’espace et de forme, qui l’incitent à centrer son texte et à faire mouche en quelques vers. Les nouvelles qu’il délivre sont d’abord liées à son lieu de vie, à ce territoire qu’il arpente à la fois avec son corps et avec ses mots, mais pas seulement.

« Du terminal de Calais, l’autoroute du / soir file à l’est, vers Isbergues. Au / loin, sur la gauche, le vitrage jaune / de l’aciérie électrique transperce le / crépuscule. Les électrodes descendent / lentement dans le chaudron débordant, / gavé de déchets, de ferraille débitée / en morceaux. La soupe métallique fond / dans la marmite en embrasant le ciel. »

L’envie de bouger est en lui. Il la guette. En profite, dès qu’elle frémit, pour lever le camp. Il lui faut peu de temps, peu de mots pour s’ouvrir aux vents d’ailleurs, pour le dire au peintre, pour s’enquérir des tribulations nocturnes de « L’ankou-loup », pour pénétrer dans le monde feutré du mystérieux « chat de Garbecque » ou pour glisser, de flaque en flaque, dans celui du macareux qui sautille « en habit de pingouin ». Les animaux sont ici très présents. Suel et Brown, tout au long de leur collaboration, leur réservent une place de choix.

« Travailleurs, camarades castors de tous pays, soyez unis comme des dents à l’intérieur de la bouche. »

Ourson les neiges d’antan ? est un livre de plein air, une bonne bouffée d’oxygène, une façon dynamique de circuler en poésie en allant à la rencontre de quelques uns de ceux qui peuplent le grand dehors.

Lucien Suel et William Brown : Ourson les neiges d'antan ? éditions Pierre Mainard.

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