dimanche 10 juillet 2022

Collection Supersonniques

La collection Supersoniques, initiée par les éditions Philharmonie de Paris, entend faire se rencontrer écriture, arts et musiques. Conçu autour d’une figure majeure de l’histoire de la musique, chaque titre est confié à un écrivain qui travaille en étroite collaboration avec un plasticien. Texte et graphisme revisitent de façon originale et dynamique l’œuvre choisie. Les deux titres qui viennent de paraître sont consacrés à Franz Liszt et à Béla Bartók.

Emmanuelle Pireyre, qui raconte Franz Liszt, dit combien le parcours musical de celui-ci est animé par son attrait pour les Tsiganes. Dès son enfance en Hongrie, où il est né en 1811, il est subjugué par leur liberté, leur inventivité, leur mode de vie, leurs danses et leur musique qu’il découvre en assistant aux concerts des troupes de Bohémiens qui se produisent dans son village. Cette passion, qui ne se démentira jamais, l’amènera à collecter des mélodies et alimentera parfois ses propres compositions, à commencer par ses Rhapsodies hongroises.

« Plus tard, c’est le mode de vie itinérant qui rapproche Liszt des Bohémiens. Dans l’imaginaire des peuples du voyage, l’humanité se divise en deux : Tsiganes voyageurs et gadjé sédentaires. Liszt, franchissant la frontière des catégories, s’identifie au côté voyageur. De fait, il a quitté son pays à douze ans, sillonné l’Europe dans tous les sens comme enfant prodige, puis comme pianiste virtuose. Il aura vécu presque toujours en voyage, partout étranger, comme le sont les Tsiganes. »

Le passionnant texte d’Emmanuelle Pireyre est accompagné par des images de Anna Katharina Scheidegger, en l’occurrence des photogrammes argentiques qui prolongent la série que l’artiste suisse a consacré au glacier du Rhône, dans le canton du Valais.

Le volume dédié à Béla Bartók (1881-1975) est dû à Peter Szendy qui a choisi d’explorer l’œuvre du compositeur et pianiste, né lui aussi en Hongrie, en créant un abécédaire capable d’éclairer la personnalité, la musique et la pensée de celui qui a sillonné les villages ruraux d’Europe muni d’un phonographe à manivelle dans le but de préserver et d’archiver des pièces rares du patrimoine musical. La présence de l’eau, de la nature et des animaux y est très prégnante. Celles des nuages, du vent, des oiseaux également. À la fin de sa vie, malade, exilé aux Etats-Unis, Bartók fuira la ville dès qu’il le peut. Dans une lettre à Ditta, sa seconde femme, il écrira, en accompagnement de l’une de ses compositions :

« Ceci n’est pas ma composition mais celle d’un oiseau ; il vient de la siffloter, un bon nombre de fois. Quels concerts d’oiseaux il y a ici, depuis l’aube jusqu’au soir. »

L’abécédaire concocté par Peter Szendy est accompagné par des détails de nuages, superbes et reproduits sur de pleines pages, dus à Anri Sala, artiste albanais qui n’a de cesse, dans ses créations, de mêler image, son et architecture.

Supersoniques N° 5 : Franz Liszt par Emmanuelle Pireyre et Anna Katharina Scheidegger, N° 6 : Béla Bartók par Peter Szendy et Anri Sala, Philharmonie de Paris éditions


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