À la fin de sa vie, Burroughs, souffrant d’arthrite, ne peut plus taper à la machine. Ses proches décident alors de lui offrir des livres blancs. C’est grâce à eux, il en remplira huit au total, grâce à ces pages sur lesquelles il va noter, au jour le jour, durant un an et demi, de novembre 1996 à fin juillet 1997, à peu près tout ce qui constitue son quotidien, que va prendre forme cet ultime ouvrage.
Burroughs ne se contente pas de décrire ce qu’il vit. Il y ajoute ce qu’on lui connaît depuis toujours, sa hargne, ses pirouettes, ses ressassements, ses nouvelles idées, sa volonté de décrypter le mal, la bêtise et ce qu’il nomme "la conspiration internationale du mensonge", son humour cinglant, son amour des chats (Calico Jane, Fletch, Ruski, Ginger), ses détours - de mémoire - vers Tanger, Paris, Mexico, New York et la présence réconfortante de ses amis morts (Timothy Leary, Herbert Huncke, Brion Gysin) ou sur le point de quitter la scène (Ginsberg).
Burroughs ne se contente pas de décrire ce qu’il vit. Il y ajoute ce qu’on lui connaît depuis toujours, sa hargne, ses pirouettes, ses ressassements, ses nouvelles idées, sa volonté de décrypter le mal, la bêtise et ce qu’il nomme "la conspiration internationale du mensonge", son humour cinglant, son amour des chats (Calico Jane, Fletch, Ruski, Ginger), ses détours - de mémoire - vers Tanger, Paris, Mexico, New York et la présence réconfortante de ses amis morts (Timothy Leary, Herbert Huncke, Brion Gysin) ou sur le point de quitter la scène (Ginsberg).
" 3 avril 1997. Jeudi. Allen Ginsberg est en train de mourir d’un cancer du foie. "Environ deux ou trois mois", lui disent les médecins, et lui, dit : "Moins, à mon avis".
Il dit : "Je pensais que je serais terrifié, au lieu de quoi je suis exalté". J’espère juste qu’il n’est pas submergé par des marques de tendresse étouffantes".
" 5 avril 1997. Samedi. Allen Ginsberg est mort (ce matin) ; paisible, sans douleur. Il avait raison. Quand les docteurs ont dit 2 à 4 mois, il a dit : "Moins, à mon avis". "
Durant ses dernières années, Burroughs vivait à Lawrence, Kansas, dans une rue calme. Ceux qui lui rendaient le plus souvent visite (James Grauerholz - son exécuteur testamentaire - qui signe la préface et les notes de ce volume, Tom Peschio, John Giorno, Jim MacCrary) trouvaient généralement un chat affalé près de la porte d’entrée. Ses journées étaient méthodiquement règlées. Il les passait à lire, à dormir, à recevoir. Prenait tous les matins sa méthadone et ne passait pas une nuit sans avoir, à portée de main, son fusil chargé sous les draps. On retrouve là, hors écriture, les deux passions qui n’auront jamais quittées l’écrivain : la drogue et les armes à feu. Le 29 juillet 1997, cinq jours avant sa mort, il participe à sa dernière séance de tir, à la ferme de son ami Fred Aldrich. Quant à la drogue, il s’y adonna jusqu’au dernier jour.
Suivre Burroughs dans ses Ultimes paroles (ensemble traduit par Mona de Pracontal), c’est aussi côtoyer tous ceux, proches ou pas, qui l’accompagnent en permanence. Shakespeare et Conrad sont fréquemment évoqués. Verlaine également ("Mon passé fut un fleuve maudit"). De même Robert Filliou, Maurice Girodias, Brion Gysin.
" Le chagrin est une émotion de base, comme la joie et la guerre - la pure volonté de tuer. Je les ai tous connus. Et tout ceci je le dois à un seul homme - Brion Gysin. Le seul homme que j’aie jamais respecté. "
Le regard de l’écrivain sur ce qui l’entoure (notamment la politique américaine, les racismes, les discriminations, la guerre au Rwanda) en ces années 1996 et 1997 est vif et acerbe mais sans illusion. À 83 ans, il sait que continuer à vivre, garder sa colère intacte, écrire, lire, réfléchir, revenir sur certains détails de son œuvre et de sa vie, tout cela demande déjà beaucoup d’énergie et qu’il vaut mieux ne pas en rajouter.
« Je m’appelle William S. Burroughs. Je suis un humble praticien du métier de scribe, un sergent-major de l’Escadron Shakespeare. »
William Burroughs : Ultimes paroles, collection Titres, éd. Bourgois.
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